lundi 12 juillet 2010

Premier jour à Arequipa

Seule au bout du monde, premiers pas dans une ville andine au climat désertique, brûlante sous le soleil, glaciale la nuit, aux paysages lunaires, volcans désolés surplombant à 6000 mètres une terre rouge où se développent quelques cactus millénaires. Premiers contacts avec l'institut dans lequel j'enseignerai dès mercredi, grand bâtiment aux petites salles de cours sommaires, et, ô miracle, une machine à café dans la salle des enseignants. Les cours commenceront très tôt le matin, au garde à vous dès 7h30, et se finiront parfois à 21h30. La plupart des élèves (et oui, la terminologie FLE telle que nous la connaissons n'a pas encore pénétré les montagnes péruviennes, ici point d'apprenants!) sont des adultes et des étudiants dont les objectifs sont élevés et extrêmement pragmatiques: partir vivre ou étudier au Québec ou en France, alors vite, vite, savoir la langue, savoir communiquer quotidiennement. Les manuels utilisés (remaniés pour une approche majoritairement orale, où l'écrit, la civilisation et les cultures francophones ne sont qu'annexes) sont surtout Tout va bien! (niveaux débutant, intermédiaire et avancé, ici le CECR et son échelle critériée sont très peu connus, encore moins exploités), et les manuels Expression Orale niveaux 1,2 et 3 de Cle International. Pour l'instant je n'assurerai que des cours particuliers, et nous essaierons de mettre en place dès septembre ou octobre des cours en groupes. Rassurée par ces conditions où la relation privilégiée enseignant-élève me permettra de me faire la patte rapidement, je suis aussi un peu frustée. Je veux, que dis-je, j'impose, que des cours en groupes soient mis en place au plus vite! J'ai un besoin très puissant de confronter enfin toute la théorie apprise pendant le M1, les questions de dynamique de groupe, de montage d'unités didactiques, d'introduction du ludique... à une situation réelle. Mais ça viendra, et je suis motivée pour participer activement à l'élaboration de ce projet. La mise en place d'un agenda culturel également (projection de films francophones, ateliers "apéro" avec découverte culinaire, ateliers théâtre, poésie... ) est en projet, et je veux me sentir investie dans ces multiples projets. Pour l'instant je découvre la ville et le fonctionnement de l'institut, je remets doucement le pied à l'étrier de la culture andine (interculturalité, quand tu nous tiens!). La maison dans laquelle je suis logée par exemple, avec d'autres enseignantes-stagiaires, est mitoyenne avec celle des propriétaires, et les expériences parfois malheureuses de certaines de mes collocataires ont d'ores et déjà démontré qu'il reste inconcevable pour la société traditionnaliste andine (où se dessine avec une force à la fois puissante et inquiétante le message catholique et la toute-puissance d'un Christ dont on sait pourtant qu'il a été imposé dans le sang et dans le feu à des peuples indiens qui vénéraient jusqu'alors en toute sérénité la Pachamama, la Terre-Mère); qu'il reste inconcevable donc de ramener un jeune homme, fût-il de bonne famille, dans ses draps. Mince alors! La connaissance "biblique" des jeunes péruviens était pourtant dans mes objectifs durant ce stage! Trêve de plaisanterie, ramener des amis, faire la fête ou même écouter de la musique un peu trop fort ne seront pas à l'ordre du jour dans cette maison, cela me laissera le temps donc de prendre ce stage très au sérieux. Malheureusement, pas d'internet non plus à l'appartement, oh meine Gutt, coupée du monde multimédia auquel j'étais devenue extrêmement dépendante, comment faire??? Ecrire, certainement, écrire beaucoup, tous les jours, lire aussi, et bien entendu préparer mes cours (mais ça en vérité ce sera plutôt à l'institut, où j'aurai la possibilité de faire appel à la moindre hésitation à mon meilleur ami wikipédia, et à mon deuxième meilleur pote TV5 Monde.fr), écrire donc, comme exutoire, comme contact. Hâte de commencer à présent, de prendre mes marques et de faire mon nid dans cette ville où tout, enfin, doit être possible de nouveau...